Bien visible depuis la maison de mes
parents, le pont d'Arciat fait partie des premières visions de ma petite
enfance. Le souvenir ne m'en a jamais quitté. |
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L'inauguration, en 1904 le 4 septembre, fut une fête comme on n'en avait jamais
vue dans la région, avec beaucoup de personnalités, des discours à n'en plus
finir et un gigantesque banquet servi sous une tente dans la prairie à 600
convives. Dans l'après-midi, concerts par les fanfares, joutes sur la Saône,
fête foraine .... Le soir, illuminations sur le pont et grand bal populaire ...
Au pays, on garda longtemps le souvenir de cette journée. |
Les premières années après sa mise en service, le pont fut surtout utilisé par
des attelages de chevaux pour le transport de marchandises ou pour le
déplacement des personnes puis petit à petit pour les voitures et les camions.
L'été le pont servait quelquefois de terrain de rencontre pour des bagarres
entre bergers de l'Ain «Les bressans» et ceux de Saône et Loire «Les picounas »,
Après plusieurs jours de défis, d'insultes et de chansons grivoises, rendez-vous
était pris au milieu du pont pour un pugilat qui n'a jamais fait de blessés
sérieux, mais «l'honneur» était sauf et chacun retournait de son coté,
satisfait.
Un autre amusement des bergers consistait à transporter une lourde pierre depuis
la rive et à la laisser tomber du haut du pont, près du bateau d'un pêcheur à la
ligne installé près d'une pile.
Pendant la guerre de 39/45, lorsque les restrictions se firent de plus en plus
dures, le pont fut emprunté par un nombre de plus en plus important de gens qui,
à pied ou à bicyclette, venaient dans les fermes pour essayer de trouver un peu
de ravitaillement; des œufs, des fromages, des pommes de terre, quelquefois une
volaille pour les plus chanceux. Il s'agissait surtout de lyonnais qui prenaient
le train jusqu'à Crèches, ceci malgré la surveillance des gendarmes à l'entrée
du pont.
Lorsque la zone sud fut occupée en novembre 1942, le gouvernement de Vichy
instaura (sur ordre des occupants allemands) la garde des ponts et des voies
ferrées pour empêcher le sabotage par la résistance. A Cormoranche, tous les
hommes valides furent réquisitionnés pour garder le pont toutes les nuits. Une
grande guérite fut installée côté Ain. La garde se résumait surtout à des
parties de cartes dans la guérite.
Après l'annonce du débarquement en Normandie le 6 juin 1944, l'armée de la
résistance de l'Ain dressa des barrages aux entrées de Cormoranche, vers le
cimetière, au pont d'Avanon et le troisième à la croix d'Arciat avec un poste
avancé vers la culée du pont. Les allemands furent bien sûr prévenus et le 9
juin après-midi, ils investirent le village des trois côtés où étaient installés
les barrages. Les allemands sont arrivés sur le pont d'Arciat vers 1 heure de
l'après-midi, ils descendirent d'un car de la régie de Saône et Loire qui
s'était arrêté au début du pont qu'ils franchirent en file indienne sur chaque
trottoir. Les quatre résistants qui occupaient la guérite furent surpris au
milieu de leur repas et durent se replier, l'un deux fut tué, ensuite la
bataille dura une partie de l'après-midi. Devant la tournure prise par les
évènements, nous étions partis nous cacher dans la prairie, mes parents, mon
frère et moi ainsi que des voisins. Lorsque la fusillade s'est calmée, nous
avons vu une fumée s'élever depuis le sud d'Arciat. «Les allemands mettent le
feu au hameau!» avons-nous pensé. Mes parents avaient l'impression que c'était
notre ferme qui brûlait. Nous sommes revenus avec beaucoup de précautions, mais
les allemands étaient déjà repartis après avoir mis le feu à la première ferme
du hameau d'où étaient partis les coups de feu. Il faut saluer le courage des
pompiers de Cormoranche de l'époque, qui n'hésitèrent pas à intervenir sitôt les
allemands partis, aidés par une partie de la population car, à cette époque, la
pompe à incendie à bras devait être alimentée en eau par de nombreuses personnes
faisant la chaîne avec des seaux en toile depuis le plus proche point d'eau. Les
dégâts furent limités à la destruction d'un hangar, mais les pièces d'habitation
furent protégées.
Après le débarquement en Provence des américains et des français, le 15 août 1944, l'armée allemande commença un repli vers le nord de plus en plus rapide.
Presque tous les jours, les avions
alliés venaient mitrailler les convois allemands qui battaient en retraite. Le 2
septembre 1944, un fort détachement allemand fit halte à Cormoranche, occupant
les maisons et réquisitionnant tout ce qui pouvait servir à leur fuite; chevaux,
avec chars, bicyclettes.
Ce jour-là, il plut toute la journée, ce qui empêcha l'aviation alliée
d'intervenir. A Arciat, nous n'avons vu qu'un seul soldat allemand qui
recherchait un vélo, mais comme ils étaient bien cachés ou dépourvus de pneus,
il dut repartir les mains vides.
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Le lundi 4 septembre 1944, une rumeur déferla sur le village et sur les hameaux.
Les Américains arrivent Il! En effet, les troupes américaines remontaient la
rive gauche de la Saône, bientôt suivis sur la rive droite par l'armée
française du général De Lattre. Quel soulagement! Nous étions délivrés! Fini le
cauchemar.
Sur la Saône, un bac fut installé assez vite ce qui permit le passage des
attelages et des autos.
Le déblaiement de centaines de m3 de maçonnerie commença presqu'aussitôt mais
dura très longtemps car après la guerre, les moyens mis en œuvre étaient assez
réduits.
Puis vint la reconstruction d'un autre pont, les piles en premier, ensuite le
pont métallique construit sur la berge côté Crèches fut poussé tout doucement
sur les piles. Lorsque je suis parti faire mon service militaire en octobre
1950, le pont était presque poussé jusqu'au milieu de la rivière, et lorsque je
suis revenu à ma première permission après quatorze mois en Algérie, tout était
terminé et j'ai pu emprunter le pont pour rentrer chez moi.
Note sur le port d'Arciat (coté Crêches
sur Saône)
Le hameau d'Arciat en
1911.
N° 1 et 2 :
Antoine PERRIN et
Françoise TUPINIER.
N° 7 à 11 : Jean Marie BESSON décédé à Cormoranche le 1/05/1919 à son retour de
guerre (voir page consacrée à ce soldat).
- Jeanne Antoinette Valérie née le 28/10/1906; mariée à Cormoranche le
12/11/1927 avec Jules Couturier.
- Marie Catherine née le 12/04/1908; mariée à Macon le 17/05/1930 avec Ali Ben
Abed LABED; remariée à Macon le 17/05/1942 avec Ali Ben Abed LABED (?); décédée
à Macon le 20/10/1965.
- Marie Joséphine née le 31/12/1909; mariée à Cormoranche le 15/11/1930 avec
Antoine Gabriel PARDON.
- Hélène BESSON née le 29/04/1914
N° 25 :
Pierre Claudius HYVERNAT.
N° 30 :
Jean Claude PERRIN
N° 31 :
Charles PERRIN
N° 37 : Jean Pierre ORGERET (lien
1 -
lien 2)
N° 53 : Louis BETHURY (fils ne
figurant pas sur le relevé ci-dessus) né en 1896; décédé le 26/04/1917 (voir
page consacrée à ce soldat).
- Rose née le 25/12/1899; mariée à Crèches le 22/12/1927 avec Henri BARRIER.
- Marie née le 21/01/1905.
- Henri né le 8/11/1906; marié à Saint Laurent le 28/03/1931 avec Léonie
GREFFET; décédé le 9/08/1962 à Macon.
- Germaine née le 21/4/1909; mariée le 17/05/1930 avec Pierre Marie VILLET.
N° 62 et 63 : Claude JOLY et Françoise
BAJARD arrières grand parents de Roland PROLONGE.
Dernière ligne : Germaine PLATTARD : la mère de Roland PROLONGE.
Antonine JOLY : la grand mère de Roland PROLONGE.
La Saône et le hameau
d'Arciat
Roland PROLONGE :
Au XIXe siècle la crue de référence reste celle de 1840 avec la destruction de
plus de 100 maisons à Cormoranche.
Au XXe siècle j'ai noté comme crues importantes avant guerre ( + de 5.50 m) :
- Mars 1906 : 5.68 m.
- Janvier 1910 : 6.46 m.
- Février 1910 : 5.66 m.
- Décembre 1910 : 5.58 m.
- Novembre 1913 : 6.05 m.
La Saône gelée : En 1911 un patineur parcouru 30 km sur la Saône gelée entre
Macon et Tournus.
La pèche professionnelle : Au début du XIXe siècle la pèche dans la Saône par
des pécheurs professionnels faisaient vivre de nombreuses familles; en effet la
demande de poissons d'eau douce étaient très importante car le manque de
transports frigorifiques rendait impossible le ravitaillement en poissons de mer
pendant la saison chaude.
Suivant la saison différents modes de pèche étaient pratiqués :
- la pèche à la comble (grande senne) ce qui nécessitait une équipe de 10
à 15 personnes.
- la pèche au tramail(1) : on entourait un herbier avec le filet puis on
chassait les poissons à grands coups de perche pour qu'ils se prennent dans le
filet.
- l'épervier était utilisé pendant la saison chaude pour ravitailler en
petite friture les restaurants du bord de l'eau.
- les nasses placées dans les passage aménagés dans les jonce et les
roseaux.
Pèche à la comble |
Pèche à l'épervier |
Pendant les crues de printemps des
verveux étaient placés dans les fossés ou le long des buissons immergés surtout
pour prendre les brochets abondants à cette époque.
Le carrelet et les araignées (filets maillants) étaient également utilisés.
Les poissons pris étaient stockés vivants dans de grands viviers compartimentés
et percés de petits trous pour renouveler l'eau (ces viviers étaient appelés
Beches).
Si une partie de la pèche était vendue sur place une part importante était
envoyée à Lyon dans les viviers descendus par remorqueurs et vendus à des
négociants en gros.
Types de poissons péchés : brochet, perche, tanche, anguille, carpe, chevesne,
brème, rousse, petite friture.
Actuellement la pèche professionnelle à presque disparue; les causes :
- les dragages qui ont bouleversés les fonds entrainant la disparition des
joncs et des herbiers, refuge des poissons.
- le passage des gros bateaux,
- la pollution.
(1) Filet mouillé verticalement, composé de trois nappes, deux extérieures à
larges mailles et une intérieure à mailles beaucoup plus petites, qui
constituent un piège dans lequel le poisson demeure prisonnier.
Les 4 pécheurs d'Arciat en 1911
Source HYVERNAT Claudius |
Recensement Cormoranche 1931 - Arciat - |
BETHURY Louis |
Né à Cormoranche Arciat le 17/06/1872. |
LOUPFOREST Jean François |
Né à Cormoranche Arciat le 17/11/1859. |
BESSON Jean Claude |
Né à Cormoranche le 9/02/1881; marié à Cormoranche le 14/11/1909 avec Marie Claudine LOUPFOREST. Il décède le 4/05/1914 à Arciat. |